Description

L’héritage colonial et la question de la mondialisation interrogent les sociétés océaniennes contemporaines sur leur relation au passé. Dans les récits de fiction océaniens la représentation de l’histoire occupe ainsi une place importante. La place de l’histoire dans la fiction engage la relation des hommes au passé et le rapport entre histoire et mémoire. Mais elle implique également la conception du temps et de l’espace qui construit nos représentations de l’histoire et de la mémoire, et en particulier l’originalité de l’approche océanienne de ces concepts.
Cet ouvrage s’efforce de décrire les figures du passé et de l’histoire dans le récit de fiction, la façon dont elles sont organisées et le point à partir duquel elles sont mises en scène. Se dévoile ainsi la façon dont les récits de fiction constituent ce qui vaut pour de l’histoire et en redéfinissent les frontières. Mais, comme nous invitent à le penser les travaux de Paul Ricœur, ce n’est pas lorsque la fiction met en scène des références explicites au passé qu’elle pose les problèmes les plus intéressants quant au rapport des hommes au temps et à l’histoire. Il s’agit donc également d’examiner comment les récits océaniens travaillent le concept même d’histoire. Ils mettent en jeu le sens de l’histoire en interrogeant les modalités de l’action humaine, et en particulier la liberté ou les déterminismes qui la caractérisent. Ils configurent une expérience originale de l’espace-temps et, ainsi, les fondements d’une conception océanienne de l’histoire. Les récits de fiction élaborent cependant différentes modélisations de l’histoire : certains mettent l’accent sur son caractère destructeur en opposant une représentation harmonieuse et atemporelle « du monde ancien » à une entrée douloureuse et aliénante dans l’histoire contemporaine. D’autres choisissent d’explorer un rapport océanien à l’espace-temps, fondé sur la continuité vivante des relations entre passé, présent et futur. Ils figurent une historicité originale et dynamique qui rend l’initiative au sujet océanien et lui permet de s’approprier les apports exogènes sans renoncer à son éthique et son identité particulières, héritées de ses ancêtres et sans cesse réactualisées en fonction de circonstances changeantes.